17 novembre
Journée mondiale de la prématurité
"La prématurité : quand le lien se tisse au cœur d’un douloureux bouleversement"
La prématurité, c’est parfois comme si l’on avait volé à une mère et à son enfant une part précieuse de leur histoire commune. En Belgique, près de 8 naissances sur 100 surviennent avant 37 semaines de grossesse. Un chiffre qui rappelle combien cette réalité n’est pas rare, mais qui ne dit rien de l’intensité du vécu derrière chaque naissance prématurée. Pour les familles, c’est un véritable bouleversement, un défi émotionnel, médical et humain.
Les avancées scientifiques et psychologiques ont été immenses. Aujourd’hui, on sait à quel point la présence des parents est essentielle : un bébé prématuré qui sent la chaleur d’un corps, une voix familière, des mains qui enveloppent, évolue mieux. Le peau-à-peau n’est pas un simple geste de tendresse : c’est un soin, une façon de tisser un lien que les circonstances n’ont pas épargné.
Mais la relation se construit au travers d’obstacles nombreux. Même lorsqu’un bébé naît à terme, la parentalité est une aventure complexe. Les enjeux et les défis le sont d’autant plus grands quand le tout-petit est fragile, appareillé, entouré de machines et de lumières qui rassurent autant qu’elles effraient. Dans cet environnement hypermédicalisé, ce post-partum doux qu’ils avaient espéré vivre dans une bulle de bonheur devient une expérience anxiogène, parfois déroutante, même si elle ne manque pas d’amour. Et, s’il vient un moment de rentrer à la maison sans son enfant, le cœur se fissure un peu plus. L’équipe soignante joue un rôle précieux dans ce parcours de parentalité si particulier, surtout lorsque le pronostic vital de l’enfant est engagé.
Aux préoccupations concernant l’avenir – proche ou lointain – se mêle souvent un profond sentiment de culpabilité. Les parents doivent parfois faire face à plusieurs deuils : celui d’une fin de grossesse, d’un accouchement imaginé autrement, d’un bébé tel qu’ils l’avaient rêvé. Ils peuvent se sentir impuissants, isolés, incompris, dépossédés de leur rôle. La fatigue, l’organisation complexe du quotidien, et parfois la gestion d’autres enfants, ajoutent encore au poids qu’ils portent.
Le désarroi de ces parents fragilisés est parfois bien enfui sous une force admirable, souvent immense. Une force née de l’amour, de l’instinct de protéger ce petit être qui se bat chaque jour. Mais cette force peut se fissurer, et il arrive que les émotions longtemps mises de côté finissent par submerger. L’expérience de la prématurité, que ce soit pendant la grossesse, l’accouchement ou le séjour en néonatologie, peut constituer un véritable traumatisme. C’est pourquoi l’accompagnement par des professionnel.le.s peut s’avérer utile : pour déposer, comprendre, exorciser, apaiser, reconstruire.
Grâce aux progrès extraordinaires de la médecine, de nombreux bébés nés très tôt peuvent aujourd’hui survivre. Mais les risques de séquelles ou de troubles neurodéveloppementaux restent présents, et cette inquiétude peut perdurer longtemps après la sortie de l’hôpital et, plus tard, influencer tous les aspects de l’éducation.
Même des années plus tard, l’empreinte émotionnelle de cette période peut demeurer. Certains parents n’arrivent d’ailleurs jamais à raconter cette histoire à leur enfant, tant elle a été douloureuse et demeure sensible. Et pourtant, ces enfants ont besoin d’entendre des mots apaisés pour accompagner ce dont leur corps se souvient avoir vécu.
À toutes les familles concernées
Vous n’êtes pas seules.
Vos émotions, quelles qu’elles soient, ont une place et une légitimité.
Elles n’enlèvent rien à votre amour, vos compétences parentales et votre incroyable force.
Au contraire, elles font de vous des humains. Et elles vous serviront si vous leur laisser une place.
Ressources :
* https://labulleneomat.webnode.fr/
* http://www.prematurite.be/allerplusloin/associations.php
* "Le début de la vie d'un grand prématuré expliqué à ses parents" de Christian Dageville, Editions Erès.
* "Naître prématuré. Le bébé, son médecin et son psychanalyste" de Catherine Vanier, Editions Bayard.
* La maison des maternelles "Prématurés, des bébés comme les autres" : https://www.youtube.com/watch?v=RCP9F1kyyEc
* La maison des maternelles "le combat des prémas" : https://www.youtube.com/watch?v=gvwtYmdd_NA
* La maison des maternelles "Parents de prémas, un si long combat" : https://www.youtube.com/watch?v=4tDPrPk-ZJg
* "Influences de la grande prématurité sur la construction de la maternité", de Céline Herregods, Bibliothèque de l'UCl: https://dial-mem.test.bib.ucl.ac.be/entities/masterthesis/ccc439a4-3209-436e-bea6-9fb345a04a50
« Il faudrait arrêter les femmes à 7 mois de grossesse » : un bébé sur dix naît prématurément en Belgique, quels sont les moyens d’action ? - RTL Info https://share.google/6v4F2M9gjJxYfC94O
"À toi mon trésor, mon petit amour, mon bébé prématuré,
J’aurais aimé qu’on me dise qu’un bébé arrive quand il le décide, quel que soit son poids, sa taille et sa maturité et que mes cris ne seraient pas entendus même si je hurlais de toutes mes forces que je n’étais pas prête, que tu n’étais pas prêt.
J’aurais aimé qu’on me dise que parfois tout ne se passe pas comme prévu, comme espéré, comme projeté.
J’aurais aimé qu’on me dise qu’à la minute où tu serais là, j’oublierais tout de moi, pour toi. Parce que dès tu es né, c’est ta vie qu’il fallait sauver, c’est elle qu’il fallait prioriser.
J’aurais aimé qu’on me dise que le corps et l’esprit sont capables de dépasser la douleur pour atteindre un objectif, et encore plus quand celui-ci est de passer du temps avec son petit, endormi seul dans une chambre éloignée.
J’aurais aimé qu’on me dise que ça ne serait pas facile de te voir enfermé dans cette couveuse. Que la raison ne peut pas toujours l’emporter sur les émotions. Que de savoir que c’était absolument nécessaire pour ta survie ne rendrait pas la souffrance plus décente.
J’aurais aimé qu’on me dise que j’avais le droit de trouver la néonatalogie insupportable. Que j’avais le droit d’avoir le cœur brisé en mille morceaux en voyant les autres parents rentrer dans leurs chaleureuses maisons avec leur nourrisson dans les bras alors que je restais là, entre ces quatre murs aseptisés, à attendre d’avoir l’autorisation de former une famille avec toi.
J’aurais aimé qu’on me prévienne que j’allais vivre au rythme du passage des médecins, attendant leurs visites avec impatience et angoisse. Que ce mélange d’émotions aux antipodes, chaque jour, m’userait un peu davantage.
J’aurais aimé qu’on me dise que l’on démarre parfois sa vie de parent de manière différente que celle imaginée, mais qu’assurément on y survit. Et que ce n’est pas grave, que l’on peut y trouver des remèdes, que nous sommes pleins de ressources et qu’il existe des manières de combler le manque.
J’aurais aimé qu’on comprenne ma solitude face aux autres familles, venant d’accueillir un nouveau petit être dans la sérénité et la sécurité, alors que notre quotidien n’était qu’incertitude et appréhensions.
J’aurais aimé que des bras me serrent pour accueillir toute ma détresse face à toi, face à mes inquiétudes pour ta santé, pour ta vie. J’aurais tellement aimé être serrée fort, en silence.
J’aurais aimé qu’on ne soit pas surpris de ma capacité à endosser mon rôle de mère malgré les difficultés, malgré les embûches. Dès ton premier souffle, je suis devenue ta maman et ce, bien que tu te sois cramponné aux câbles de ton moniteur avant même d’attraper mes propres doigts.
J’aurais aimé qu’on ne s’étonne pas que je puisse te serrer dans mes bras avec assurance alors que tu étais si petit et chétif.
J’aurais aimé qu’on me dise que ce qui se passait là nous changerait à jamais. La peur de te perdre et la prise de conscience de la fragilité de la vie ont laissé des traces dans notre vision de la vie.
J’aurais aimé que les autres comprennent que tu étais si fragile, que tu avais tant besoin de tes parents dont tu étais privé. Que nous n’en ferions jamais trop, que c’était juste assez.
J’aurais voulu ne pas entendre que je te gâtais trop, que je prenais trop soin de toi, en étant juste là, en te prenant contre moi pour que tu saches que même si ta vie n’avait pas commencé dans les meilleurs conditions, tu pouvais compter sur moi, que nous formerions désormais une équipe indissoluble, face à la brise, au vent ou à la tempête.
J’aurais aimé qu’on me dise que je pouvais pleurer, encore et encore ; que c’était la faute aux hormones, la faute à pas de chance, la faute à la vie qui t’avait pourtant offert à moi.
J’aurais aimé qu’on me dise que devenir mère en néonatalogie, c’étaient des émotions décuplées, un vide que je me sentais obligée de combler par toutes les manières, un bonheur fragile qui me semblait ne pas m’appartenir, des secondes semblant être des heures.
J’aurais aimé être entourée d’amour, de bienveillance, de tendresse et d’une fougueuse empathie.
J’aurais aimé ne pas devoir expliquer pourquoi j’ai encore à ce point besoin de te protéger.
J’aimerais que chacun de mes premiers pas de mère, de parent, soit respecté, reconnu et valorisé. Même ceux faits à tâtons, dans la douleur ou dans l’assurance démesurée.
À tous les parents de bébés prématurés, je vous souhaite d’être entourés d’amour, de bonté, d’indulgence et de compréhension."
Nadège PINEUR
https://parfaitemamancinglante.com
15 octobre
Journée mondiale de la sensibilisation au deuil périnatal
« Le deuil périnatal ou l’amour qui n’a nulle part où aller »
« Toute vie achevée est une vie accomplie : de même qu’une goutte d’eau contient déjà l’océan, les vies minuscules,
avec leur début si bref, leur infime zénith, leur fin rapide, n’ont pas moins de sens que les longs parcours.
Il faut seulement se pencher pour les voir, et
les agrandir pour les raconter. »
Françoise Chandernagor
Si vous êtes confronté au deuil périnatal, vous êtes sur le point de traverser un véritable deuil.
Même si cela n’est pas visible pour les autres.
Cela malgré les remarques vous invitant à rapidement oublier et vous remettre de cet événementbanalisé à tort.
Car, au-delà de certaines considérations inconvenantes,
vous surmontez la perte réelle d’un enfant que vous avez désiré, porté, attendu mais surtout aimé.
Cet amour qui, précisément,
marque la genèse de votre chagrin, peut-être même de votre colère ou de votre culpabilité.
Votre deuil, il existe. Il est authentique, légitime. Personne ne peut y toucher.
Même pas votre conjoint, s’il suit un chemin différent du vôtre.
Parfois ce petit être a cessé de vivre dans le creux du ventre de sa mère. Parfois il a habité ce
monde quelques heures, quelques jours avant de s’éteindre.
Peu importe que tout le monde ne puisse pas vous comprendre, la mort périnatale, c’est
toujours un déchirement, une douleur infinie, qu’elle soit spontanée ou provoquée.
Toutes les personnes qui avaient hâte de découvrir ce nouveau-né, de le serrer, de le connaître
et de le voir grandir, seront touchées à leur façon. Comme dit très justement Grégoire, il n’y
a pas de règles pour ces choses-là.
En Belgique, une femme sur cinq fera la triste expérience de ce qu’on nomme absurdement la
fausse couche. Et pourtant, malheureusement, cela reste tabou. Ce qui oblige les parents à
affronter l’épreuve du vide dans une trop grande solitude.
Alors, comment faire face à ce chaos ?
« On ne guérit d’une souffrance qu’à condition de l’éprouver pleinement »
Victor Hugo
* Reconnaissez votre tristesse, laissez-là vous habiter. Vous avez le droit de la ressentir.
* Osez en parler, autant et aussi longtemps que cela vous semblera nécessaire.
* Entourez-vous de personnes chaleureuses et bienveillantes qui respectent vos émotions
et acceptent de les partager avec vous.
* Soyez indulgent envers vous-même.
* Parlez de votre enfant. Nourrissez son souvenir. Gardez le lien, autrement.
* Faites-vous aider par un professionnel si vous en ressentez le besoin.
Concrètement :
* Il existe des groupes de paroles et des forums (les hôpitaux peuvent souvent vous
donner des références).
* Une merveilleuse association peut vous accompagner sur ce chemin, notamment en
photographiant gratuitement votre bébé pour vous permettre de garder des souvenirs
les plus doux possibles : https://www.audeladesnuages.be
* Vous pourrez trouver une liste de psychologues cliniciens sur www.compsy.be
(personnellement, je suis spécialisée en périnatalité et je peux vous recevoir à Liernu,
Piétrain et, très prochainement, Lonzée).
Je vous recommande quelques lectures :
* « Dans ces moments-là » de Hélène Gérin.
* « Au creux de nos bras » de Jeanne Yliss.
* « Les mots deviendront doux » de Morane Terlier (vous pouvez vous le procurer sur son
site www.moraneterlier.be).
Découvrez également, dès ce jour particulier, la parution du nouvel ouvrage de MoraneTerlier,
traitant avec une douceur infinie et un immense talent de ce sujet si délicat.